Un thriller aux accents religieux
Jean-Jacques Pelletier est l’un des auteurs de romans policiers les plus lus au Québec. Je l’ai découvert l’an passé en lisant Dix petits hommes blancs (Éditions Hurtubise). Il signe un nouveau thriller intitulé Machine God
et en profite pour étoffer ses thèmes de prédilection que sont
l’embrigadement idéologique, la manipulation des individus et des
foules, ainsi que les différentes formes d’exploitation de l’être
humain.
Tout commence par une crucifixion présentée en direct sur différents
écrans de Times Square, à New York. La victime est Mgr Ignatius
Feelgood, un archevêque à la retraite, soupçonné d’avoir caché des cas
de prêtres pédophiles.
Et l’histoire ne fait que commencer «à devenir aussi intéressante
qu’elle est pourrie». Les événements se bousculent et nous voyons des
cadavres jetés devant des églises, six catholiques assassinés pendant
une messe, un prêtre jeté en pâture dans une fosse aux lions, un iman
qui se fait décapiter et un rabbin qui disparaît.
Des groupes radicaux, chrétiens et autres, se mobilisent. Des
politiciens magouillent. On parle de terrorisme religieux, voire de
complot des services secrets. La mise en scène des crimes laisse même
croire à une œuvre d’art particulièrement perverse. Le New York Police
Department (NYPD) ne sait plus à quel saint se vouer.
Ce qui semble assez claire dans cette histoire, c’est la vision que
l’auteur se fait du christianisme, une religion qui a eu «un meurtre
comme événement fondateur» (mise à mort de Jésus). «Oser produire une
illustration aussi frappante du fait que le christianisme est une
religion fondée sur l’assassinat, personne ne l’avait jamais fait!»
Avec la décapitation de l’iman, on confond facilement un musulman avec
un intégriste et un terroriste. On se trouve plongé dans une guerre de
religions, à moins que ce soit une guerre contre les religions… La
police new-yorkaise préfère parler d’un fou ou tueur en série qui a une
fixation sur les leaders religieux.
L’affaire sur laquelle le NYPD fait enquête prend des proportions
internationales. Les policiers new-yorkais travaillent dès lors main
dans la main avec leurs homologues français, mais cela ne plaît pas au
maire pour qui les Français ne sont que… «des mangeurs de grenouilles».
Le principal suspect n’est pourtant pas un Français pas plutôt un
Canadien, un dénommé Victor Prose (qu’on a connu dans Dix petits hommes blancs).
La crucifixion de l’archevêque à la retraite et la décapitation de
l’iman, pour n’en nommer que deux, sont des événements soigneusement
chorégraphiés pour la simple raison que les mots ne suffisent plus. Même
les images ne suffisent plus. «Il faut désormais des spectacles. Des
spectacles qui ont du punch.»
Je dois signaler une chose qui m’a ennuyé dans ce roman. Les gens
envoient constamment des courriels ou des textos. Cela devient agaçant.
Je ne lis pas un roman pour plonger dans l’univers des réseaux sociaux.
Au contraire, je veux justement m’éloigner de cet embrigadement
électronique.
Jean-Jacques Pelletier sait bien multiplier et brouiller les pistes pour
rendre son intrigue plus captivante, voire déroutante. Le lecteur doit
parfois avoir le doigté de l’enquêteur new-yorkais et le flair de sa
collaboratrice française pour ne pas se perdre dans les méandres de ce
thriller aux accents religieux.
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